Hier soir, nous avons passe la soirée avec des amis français et japonais, dans un Izakaya, histoire de décompresser des deux derniers jours assez forts en tension. Le quartier de Shinjuku est étonnamment animé, il y a pas mal de monde, beaucoup de restaurants et bars sont ouverts. On ne dirait pas du tout qu’il y a eu un séisme il y a deux jours.
Pendant le repas, je suis contacté par une journaliste d’Europe 1 qui souhaite avoir mon témoignage sur la situation, et sur le ressenti a Tokyo, en particulier vis-a-vis de la menace nucléaire. J’en profite donc, avant l’interview, pour demander l’avis de japonais présents au repas, qui me répondent que l’incident nucléaire est annonce comme plus ou moins clôt, et qu’ils sont plus concernés par les coupures électriques qui sont prévues sur Tokyo, en dehors du centre de la ville (i.e. les 23 arrondissements), et par la potentielle réplique du tremblement de Terre.
Les japonais ont l’habitude des séismes, et ils ont aussi un mental très fort pour dépasser les évènements et se concentrer sur l’avenir, sur la résolution des conflits, sur la reconstruction, et tout cela avec beaucoup de sérénité. En effet, la télévision locale parle beaucoup de la recherche de disparues, et en oublie presque de parler de l’état de la centrale.
C’est durant cette interview que j’apprends l’existence d’un mail de l’ambassade, recommandant de quitter le Kanto, si rien ne nous y attache de manière expresse. J’en discute avec mes amis, mon frère en France, me confirme que les media ont fait état de ce mail, et effectivement, a mon retour a l’appartement, les informations sur le site de l’ambassade se sont changes de « Ca devrait aller » a « Si j’étais vous, j’irais bien voir dans le Kansai si vous y êtes » (merci a Elodie Rabe pour m’avoir re-confirmé cette information).
Nous décidons de partir de Tokyo pour une semaine, avec Yuka et Sto, histoire d’y voir plus clair, et de laisser un peu décanter, le plus tôt sera le mieux, car le moment ou Tokyo voudra quitter Tokyo, si ce moment arrive, je voudrais pas être dans les trains.
Kyoto semble une destination intéressante, a 500 km au Sud-Ouest de Tokyo, pas sur la côte, et a un bon rapport prix du trajet/distance/temps de trajet minimum, pas de risque de se retrouvé coincé à l’aéroport en cas de panique à Tokyo. Nous optons pour cette option, objectif : le premier Shinkansen du lendemain, sachant que les coupures de courants qui commencent demain matin affecteront les déplacements jusqu’à la gare de Tokyo. (Pourquoi pas l’avion ? Les avions sont pleins, et se rendre a Narita n’est pas simple).
Préparation d’un sac de vêtements, deux petites heures de sommeil, et levé à 5 heures, ce lundi matin. Yuka habitant loin du centre ville, l’approche jusqu’à la Yamanote est compliquée, heureusement, une âme charitable, attendant le taxi en compagnie d’autres japonais, la conduite jusqu’à Shinokubo et nous tira d’affaire ; nous arrivons sans trop d’encombre à la gare de Tokyo. Nous remercions sincèrement cette personne, même si les chances qu’elle passe par ici sur quasi-nulles.
2 heures et quart de Shinkansen plus tard, nous voici a Kyoto, fatigués par la courte nuit et la matinée agitée. Trouvons un petit hôtel près de la gare, mangeons un bout dans un petit resto, et nous reposons dans un karaoké en attendant l’heure du check-in.
Ici, on a une meilleur visibilité de la situation, on a une longueur d’avance sur Tokyo, on peut prendre les bonnes décisions sereinement, sans craindre le pire à chaque instant. Pas de retour en France prévu pour l’heure, on observe et on avisera.
Qu’est ce qui fait qu’on bascule de l’inquiétude au mouvement, à l’action ? Pour ma part, la changement de vent de la source d’information que je considérais comme de confiance, à savoir l’ambassade de France.
Des informations que nous avons ici, en relative sécurité à 800km de la centrale, nous voyons d’ici, l’exode a commencé …